Sources et Bibliographie
[1] : F.T.P.F : Créés en 1942 par le Parti communiste français, les FTPF Francs tireurs et
partisans français, également appelés Francs tireurs et partisans (FTP), regroupent des organisations paramilitaires (organisations
spéciales, Jeunesses communistes, MOI (Main-d'œuvre immigrée)), et sont placés sous la direction du « Front national » et d'un comité militaire dont Charles Tillon est le commandant en chef. Très structurés, les FTP sont partisans de la guérilla et
de l'action immédiate. En 1944 les FTP, tout en conservant leur autonomie, sont regroupés au sein des FFI. Source : www.fondationresistance.org.
[2] :
Maquis de Corrèze, 5e édition, page 215. Selon le témoignage de René Monteil cet épisode aurait plutôt eu lieu le 7 ou 8 Juillet
1943.
[3] : On trouve différentes orthographes de Guy Mocquet : Guy Môquet ou Guy Mocquet comme sur la stèle érigée en son
honneur en forêt d'Aveney, sur un piton rocheux surplombant la vallée du Doubs, au lieu-dit « Le Rocher de Valmy ». C’est
cette dernière orthographe qui a été choisie pour ce récit.
[4] : Léon Lanot, premier maquisard de Corrèze, Paul et Mouny Estrade,
Page 96.
[5] : Ibidem.
[6] : G.M.R est l’abréviation de Groupes Mobiles de Réserve. C’étaient des unités paramilitaires
créées par le gouvernement de Vichy. Leur développement fut l'affaire privilégiée de René Bousquet, directeur général de
la police nationale. Les GMR participèrent aux offensives lancées par le régime de Vichy contre les formations du maquis, sous l’autorité
de l’occupant Allemand.
[7] : Ivan Boguinski alias « Jean » médecin russe s’évada d’un camp de prisonniers à Ottingen
en Allemagne [8] puis, après un long périple, rejoignit le maquis de Corrèze où il officia comme chirurgien à l’infirmerie de
Theillet aidé de son ami Alexandre Vassilievitch Mileïchev alias « Sacha » [9].
[8] : « C’était le maquis » aux
éditions de La Veytizou : « Deux soviétiques dans la résistance » par Muriel Dichamp, page 178.
[9] : Ibidem, témoignage
d’Elise Lissajoux (épouse Terrioux), page 182.
[10] : Témoignage de Gaston Terrioux lors de la commémoration des 70 ans du camp
de Theillet le 26 mai 2013.
[11] : En plus du détachement de Puy Chassagnoux, les détachements suivants furent créés [12] :
-
Le groupe Gabriel Péri dans la région d’Eyrein commandé par Rougeot (Gaston Terrioux),
- Le groupe Lucien Sampaix dans la foret de
Chadon entre Gimel et Tulle commandé par Hercule (Lucien Ranoux),
- Le groupe Jules Vercruysse à Saint-Bonnet-Elvert commandé par Rase
Mottes.
[12] : « Jeantou » un enfant de chez nous, par Jean Maison, page 185.
[13] : Maquis de Corrèze, 5e édition, page 215.
[14] : « Au Cœur du maquis », aux éditions de la Veytizou : discours de René Vialle lors de l’inauguration
du monument érigé à Theillet le 20 novembre 1999, page 132.
[15] : Témoignage (recueilli en Mai 2013) de Mme Bachellerie de Maumont
qui connut Auguste Vangierdegom.
[16] : Le Service du Travail Obligatoire ou STO fut, durant l'occupation de la France par
L'Alemagne nazie, la réquisition et le transfert contre leur gré vers l’Allemagne de centaines de milliers de travailleurs français,
afin de participer à l'effort de guerre allemand. Entre 600 000 et 650 000 travailleurs français furent acheminés vers l'Allemagne
entre juin 1942 et juillet 1944 (source Wikipedia).
[17] : Référence [13], page 217.
[18] : Ibidem.
[19] : Référence [14],
page 134.
[20] : Elise Lissajoux (épouse de Gaston Terrioux) fut agent de liaison entre les différents camps du maquis et les
organisations de la résistance. Elle fut désignée marraine du camp Guy Mocquet le 8 Juin 1943. Elle reçue, le 21 Janvier 1946, un
hommage pour son action pendant cette période d’occupation, de la part de l’Association Nationale des amis des Francs-Tireurs et Partisans
Français, [21].
[21] : « C’était le maquis » aux éditions de La Veytizou : « Une femme agent de liaison »
par Muriel Dichamp, page 170.
[22] : Référence [14], page 134. Julien Auberty fut libéré du camp d’internement de Saint-Paul-D’Eyjeaux
en Octobre 1943 en raison de son état physique.
[23] : Référence [13], page 217.
[24] : Témoignage de René Monteil recueilli
le 26 Mai 2013 lors de la commémoration des 70 ans du camp Guy Mocquet à Theillet.
[25] : Référence [4], page 107.
[26] :
Référence [24].
[27] : Référence [13], page 218.
[28] : "La guerre et ce qui s’ensuivit", poème de Louis Aragon.
[29] :
Référence [13], page 229 et 249-252.
[30] : Phrase écrite en 1914 par Alain philosophe, de son vrai nom Émile-Auguste
Chartier.
Quelque temps plus tôt le 25 juin [2], dans le petit hameau de Theillet situé sur la même commune à un ou deux kilomètres de là, le
camp Guy Mocquet [3] avait subi une rude alerte.
Le camp, victime de sa notoriété dans la région, regroupait plus de 100 maquisards
[4].
Ils avaient établi leur campement en contrebas du village au creux des bois dans les gorges pentues du Doustre, non loin des
fermes de Raymond Auberty et Baptiste Monteil. De cette race de paysans sans qui rien n’eut été possible.
Le camp était commandé par
Léon Lanot depuis le 24 mai 1943 [5].
Les maquisards partageaient leur temps en missions de guérilla contre les troupes allemandes
et autres G.M.R. [6] et milices françaises ponctuées le plus souvent par des actions de sabotage mais aussi par des opérations de
ravitaillement en nourriture, la récupération d’armes et de munitions, le renseignement, l’édition et la distribution de journaux
et tracts d’information, la nuit le plus souvent.
Le camp Guy Mocquet haut lieu de la résistance corrézienne, abritera
pendant son existence des caches d’armes, une zone de parachutage, une imprimerie clandestine dissimulée dans une sape au creux des
bois, puis plus tard en avril 1944 une infirmerie où officiera un chirurgien Russe membre du maquis corrézien [7].
La ferme de Raymond Auberty à Theillet
La ferme de Raymond Auberty, suite à une dénonciation de collaborateurs au régime de Vichy fut ce 25 juin, l’objet d’une descente
des gendarmes et des gardes mobiles de La Roche Canillac, chef-lieu du canton, située à 7 kms.
Une sentinelle, armée d’une mitraillette
Sten, juchée sur la branche d’un sapin surveillait l’entrée du chemin conduisant au camp.
C’était l’aube d’un jour d’été, le 13 juillet 1943, au détachement des maquisards FTPF [1] de Puy Chassagnoux sur la commune de Saint-Pardoux-la-Croisille.
Les uns missionnaires de la nuit rentraient exténués pour un repos bien mérité, les autres s’éveillaient fourbus au sortir d’une nuit
étouffante de chaleur. Un jour de triste mémoire commençait.
Il organisa chaque groupe, définit les responsabilités et les lieux d’implantation [11].
Le camp Guy Mocquet doit être délogé immédiatement:
le détachement de Puy Chassagnoux fut à titre provisoire mis en place dans la nuit du 25 au 26 juin [13]. Auguste Vangierdegom alias
« Roland » y fut affecté. Le détachement de Puy-Chassagnoux conserva le nom de « camp Guy Mocquet », il fut mis
sous la responsabilité de Marcel Gibiat alias « Metallo » [14].
Juin 1940, après l’effondrement de la ligne de défense
française sous les coups de boutoirs de la Wehrmacht, le front du Nord est totalement disloqué. L’exode des civils vers le Sud s'intensifie.
Ils s'enfuient sur les routes avec de maigres bagages. Auguste Vangierdegom et sa grand-mère furent de ceux-là et se réfugièrent à
Maumont un petit village de Corrèze près de Rosiers d’Egletons. Ils furent logés dans une dépendance réquisitionnée du château de
Maumont [15].
Gare de Brive le 12 juillet 1943, un train est à quai en partance pour l’Allemagne. Il doit transporter les personnes enrôlées de
force dans le cadre du STO [16] afin de participer à l’effort de guerre allemand. Le 16 février 1942, la loi sur le Service du Travail
Obligatoire, votée par le régime de Vichy, est appliquée et stipule que tous les jeunes gens âgés de 20 à 22 ans peuvent être
envoyés en Allemagne sur simple requête de la police de Vichy.
210 jeunes sont convoqués, seulement 13 se sont présentés. Pour le train
du lendemain 150 convoqués, 7 présents [17]. C’est la confirmation de l’augmentation massive des réfractaires.
Les allemands
sont furieux du manque d’efficacité de la police de Vichy. Ils comprennent l’ampleur de l’action des maquisards et son développement
dans notre région amplifié par l’afflux croissant des défaillants au STO. Ils décident d’agir. Ils veulent frapper au cœur.
Le commandement
allemand décide d’envoyer une armée de soldats pour ratisser les bois qui abritent les camps de ces maquisards afin de les éradiquer.
Environ
mille soldats nazis [18] débarquent en gare de Tulle et sont immédiatement déployés dans les bois du plateau des étangs.
Theillet
dans la journée du 13 juillet [19] : les actions des G.M.R et gendarmes s’intensifient. Nouvelle dénonciation de collaborateurs :
Julien Auberty est arrêté. Julien est cordonnier à la ferme de Raymond son frère. Il est aussi handicapé ayant contracté la poliomyélite
dans son jeune âge.
Elise Lissajoux [20], agent de liaison du camp témoigne :
« Julien fut chargé sans ménagement dans le
fourgon des gendarmes comme un vulgaire sac de grains. Les gendarmes ne prirent même pas la peine de lui donner ses béquilles ».
Julien fut amené à Tulle et interrogé puis interné au camp de Saint-Paul-d’Eyjeaux en Haute-Vienne [22].
Détachement de Puy Chassagnoux dans la nuit du 13 au 14 juillet : les combattants FTP s’affairent et préparent leur mission respective.
Le
groupe de René Guiral est affecté au sabotage de pylônes électriques à Laguenne près de Tulle.
« Meunier », « Déplumé »,
« Raoul » et « Roland » [23] ainsi que François Tourette [24] partent en mission de ravitaillement. Ils sont surpris
par les soldats allemands qui quadrillent la zone, au carrefour qui mène au petit hameau de la Bessoule. Le combat est intense :
un allemand est tué, trois autres blessés. « Roland » s’écroule touché par les balles d’une automitrailleuse allemande [25].
Ses camarades échappent à la fusillade.
Peu de temps après l’accrochage François Tourette qui s’est enfuit à travers bois arrive à la ferme de Baptiste Monteil à Theillet.
Le fils de Baptiste, René, témoigne [26]: François Tourette est arrivé à la ferme épuisé par sa course, la peur se lisait encore dans
ses yeux, il dit : «Nous avons été attaqué par les Allemands, ça tirait dans tous les sens, j’ai réussi à m’enfuir à travers
bois, « Roland » continuait à se battre, je pense qu’il ne va pas s’en sortir».
Le lendemain matin des paysans retrouvent
son corps gisant criblé de coups de baïonnette. Son visage est écrasé par les crosses des armes et les talons des bottes allemandes
[27].
Une stèle en l’honneur de « Roland » fut érigée, peu de temps après la fin de la guerre, au carrefour menant au village
de la Bessoule là même où il tomba les armes à la main.
L’ombre de son âme dort à jamais au pied de cette croix de pierre où son nom
gravé fait ressurgir du passé ces vers du poète Louis Aragon [28]:
Déjà la pierre pense où votre nom s'inscrit
Déjà
vous n'êtes plus qu'un mot d'or sur nos places
Déjà le souvenir de vos amours s'efface
Déjà vous n'êtes plus
que pour avoir péri.
Après la guerre, la famille d’Auguste récupéra son corps pour le faire inhumer au cimetière de Charleville-Mézières d’où il était
originaire.
Auguste Vangierdegom dit « Roland » premier FTP de Corrèze tombé au combat dans la nuit du 13 au 14 juillet 1943 et victime de la barbarie nazi donna son nom au camp « Roland » mis en place dans les Monédières peu de temps après sa mort par quelques uns de ses camarades du camp Guy Mocquet [29].
La guerre fut longue et les morts, les disparus, les blessés innombrables.
Aucun mort pour rien.
Emile-Auguste Chartier écrivit en son temps:
« Je voudrais que les ombres des héros reviennent et qu'ils admirent cette paix honorable qu'ils auront achetée de leur vie » [30].
Texte écrit en l’honneur de « Roland »,
pour son engagement au sein des FTPF, pour la perpétuation de sa mémoire, et aussi pour William son petit-neveu.
Auguste Vangierdegom alias « Roland » est le premier FTP combattant tué en Corrèze. Il avait 22 ans. Son corps est récupéré
par les gendarmes de La Roche Canillac où il est décidé de lui organiser de dignes funérailles. Elles auront lieu au cimetière de
La Roche-Canillac devant une foule nombreuse et recueillie.
Surprise par l’arrivée des gendarmes elle fit un faux mouvement et une rafale de son Sten retentit en écho jusqu’au fin fond de la
vallée. Les gendarmes affolés, se croyant victimes d’une attaque terroriste, s’enfuirent. Ils n’allaient pas tarder à revenir avec
des renforts.
C’est l’alerte rouge, une réunion de commandement du camp s’organise sous l’égide de Léon Lanot, Albert Pommier et Raymond
Duvignac et quelques autres dont Gaston Terrioux [10]. La taille du camp engendre de trop gros problèmes d’intendance et de sécurité.
Léon Lanot prend immédiatement les dispositions qui s’imposent. Il dit :
« Nous allons créer plusieurs détachements de 28 hommes chacun, pour limiter les risques et les dangers. »
En 1960, devant le mémorial de Berthaucourt à Charleville-Mézières, 16 ans après la libération des Ardennes, Auguste Vangierdegom alias « Roland » fut décoré à titre posthume, de la Médaille Militaire, de la Croix de Guerre et de la Médaille de la Résistance.
Contacté par les descendants d'Auguste Vangierdegom, à la suite de la publication de cet article sur Internet, j'eus le privilège de les rencontrer en avril 2014 à Saint-Pardoux, où nous avions organisé un pélérinage extrêmement émouvant au carrefour de La Bessoule mais aussi des rencontres très poignantes avec les anciens résistants emblématiques de l'histoire de notre commune: Jean Maison, Elise Lissajoux et René Monteil tous les trois aujourd'hui disparus.